Thierry Jeandel

La campagne Installations Obsolètes fête ses 20 ans !

En 1991, une poignée d’alpinistes prestigieux du monde entier s’attaquent au nettoyage du K2, deuxième sommet le plus haut du monde. Cet acte fondateur du mouvement Mountain Wilderness a lancé le grand chantier des « Installations obsolètes ». En France, la campagne a débuté en 2001 avec le démantèlement d’une première remontée mécanique abandonnée au col Sommeiller (73). Depuis, plus de 2 600 bénévoles de l’association Mountain Wilderness France ont participé à ces opérations. de France. Grace aux 2333 bénévoles, de tous horizons et générations, nous sommes venus à bout de plus de 530 tonnes d’aménagements abandonnés en montagne. BRAVO !

8 min de lecture
Installations Obsolètes

Écrit par le comité de rédaction

Publié le 07 oct. 2021

Des aménagements abandonnés en montagne

Mountain Wilderness définit une installation obsolète (IO) comme « un aménagement artificiel abandonné dans un espace naturel de montagne peu anthropisé, ayant un impact sur la naturalité ressentie. » Une installation qui n’est plus utilisée, ni entretenue et qui n’est pas mise en valeur peut être considérée comme obsolète. La philosophie de la campagne IO n’est pas de « nettoyer » pour rendre « propre » mais de porter la réversibilité de l’empreinte humaine sur le milieu naturel. Ce démontage devrait être pris en charge techniquement et financièrement par le responsable de l’aménagement selon le principe pollueur-payeur. Ce n’est aujourd’hui malheureusement souvent pas le cas.

C’est pourquoi, Mountain Wilderness organise des chantiers de démontage, grâce à de nombreux bénévoles. Aménagements touristiques, militaires, industriels, agricoles abandonnés, les chantiers IO organisés par Mountain Wilderness démontrent la faisabilité technique et administrative des démontages, malgré des moyens limités.

Loin de porter l’ambition de démonter toutes ces installations, estimées à plus de 3000 par notre association, Mountain Wilderness a rendu visible cette problématique au travers d’opérations exemplaires.

Ben Buckland
Monika Glet
Yann Borgnet
Lionel Pascale

Une campagne emblématique et participative

Les chantiers de la campagne « Installations obsolètes » rassemblent un public large, amoureux des espaces naturels et offrent la possibilité de participer concrètement à la protection et la préservation des espaces de montagne. Les témoignages des participants sont éloquents : « une façon de rendre à la montagne un peu de ce qu’elle [m’]apporte », « participer collectivement à la dépollution d’un site », « protéger spécialement la montagne ».

Les installations obsolètes, recensées par les bénévoles, peuvent être ajoutée à l’inventaire participatif en ligne développé par Mountain Wilderness : installationsobsoletes.org. C’est en fonction, notamment, de la faisabilité de l’opération qu’un chantier sera mis en place. En effet, un important travail de préparation est préalable aux chantiers : contact avec les mairies, communautés de communes, associations du patrimoine, l’Armée, les associations foncières pastorales, les espaces naturels protégés… pour obtenir l’agrément de tous, dans une démarche consensuelle.
La logistique, quant à elle, est éprouvée par ces années d’expérience : combien de bénévoles requis ? Combien de journées prévues ? Quels outillages ? Quels types d’enlèvement et traitement ultime ? La recherche de financements et de partenaires fait aussi partie des prérequis. Ainsi, collectivités, services décentralisés de l’État, entreprises, hébergeurs... accompagnent l’association dans la mise en œuvre de ces opérations.

Le Parc national Mercantour est, par exemple, un partenaire historique de notre association. De nombreux chantiers s’y sont déroulés, grâce à la collaboration des équipes du parc et particulièrement les gardes-moniteurs. Quelle que soit la durée, les chantiers proposent des tâches accessibles à tous, la préparation et la logistique faisant aussi partie des missions réalisées grâce à l’énergie de bénévoles de tous les âges. Des petites mains aux gros bras, rien ne résiste aux bénévoles.

« La ténacité des bénévoles ont permis de venir à bout de plus de 570 tonnes de matériaux lors de plus de 68 chantiers représentant 6000 journées de travail/personne »

Rémi Monari, administrateur référent de la campagne Installations Obsolètes

Des succés à poursuivre

Depuis 2001, le travail, l’enthousiasme et la ténacité des bénévoles ont permis de venir à bout de plus de 570 tonnes de matériaux lors de plus de 68 chantiers représentant 6000 journées de travail/personne, sans compter les nombreuses heures de préparation avec des repérages, des échanges avec les collectivités.

Vingt ans plus tard, la tâche est toujours loin d’être terminée. Cette étude sur les barbelés de la frontière franco-italienne ou encore cette autre portant sur les remontées mécaniques abandonnées ne sont que des exemples de l’étendue de la tâche qui reste à accomplir pour en venir à bout.

Le travail de plaidoyer n’est pas en reste. Dans le cadre de la loi Montagne 2, votée en décembre 2016, Mountain Wilderness a réussi à faire adopter un amendement portant sur l’obligation de démontage des remontées mécaniques à l’abandon.
La prise en compte de la nécessité de démonter ces installations touristiques abandonnées progresse. Ainsi, Domaines skiables de France, qui rassemble les opérateurs de domaines skiables, s’est engagé à démonter 3 remontées mécaniques par an dans le cadre de ses «  éco-engagements   ». Un premier démontage médiatique a eu lieu à Saint-Jean-de-Sixt en Haute-Savoie, cet automne.

Il reste beaucoup à faire pour aboutir à un moratoire sur les aménagements en montagne, clef de voûte des installations obsolètes de demain. Il est temps de changer de braquet pour à la fois restaurer les espaces naturels de montagne en poursuivant le démontage des installations obsolètes et les protéger contre les aménagements lourds.

Au lendemain des États Généraux de la transition du tourisme en montagne, les enjeux liés à la transition des territoires de montagne n’ont jamais été aussi prégnants. Le modèle touristique du XXe siècle, basé sur l’économie de la neige et les aménagements lourds est à bout de souffle. Les acteurs de la montagne, rassemblés, viennent de lancer un travail inédit pour inventer ensemble de nouveaux modèles, ancrés dans les territoires et vecteurs d’une véritable « montagne à vivre » et porter une transition des territoires de montagne.

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