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Mission Giraud, rapport de la cour des comptes, One planet - Polar Summit : des préconisations et des engagements avec lesquels le projet du T3 de la Grave n'est pas en phase

Il n’y a pas tout à fait un an, le député des Hautes-Alpes Joël Giraud, ancien ministre, s’est vu confier par la Première ministre Élisabeth Borne une mission gouvernementale pour « dessiner un nouveau visage de la montagne ». Quelques jours seulement après que la Cour des comptes épingle le modèle des stations de sports d’hiver « trop dépendant du ski », il vient de rendre public ce rapport sur la montagne, fort de 34 propositions.

2 min de lecture
Transition
Aménagement
Tourisme

Écrit par Par Vincent Neirinck, Expert protection de la montagne

Publié le 28 févr. 2024

Sortir de l'ancien modèle

Le rapport préconise d’arrêter « de vouloir aller toujours plus haut, de viser toujours plus grand et avec toujours plus de canons à neige. Il faut arrêter l’extension des domaines skiables et la neige artificielle. Il faut revenir à la notion de villégiature en montagne. »
L’immobilier touristique, sujet récurrent en montagne, fait aussi l’objet de préconisations fortes : « J’ai également demandé un moratoire sur tous les nouveaux programmes immobiliers. Il faut faire une pause dans les constructions et prendre le temps de réfléchir pour ne pas reproduire les mêmes erreurs que par le passé. »

Le projet de T3 à La Grave poursuit une fuite en avant

En effet, le projet de téléphérique dit « T3 de La Grave » vise très clairement un gain en altitude et la poursuite « du modèle ancien ». Il vise à monter les piétons « toujours plus haut » (comme si la vue de la gare sommitale actuelle de 3200m n’était pas suffisamment belle), mais aussi à « stocker les skieurs sur le glacier les jours de grande affluence » (1/3 dans le vallon, 1/3 dans les bennes, 1/3 sur le glacier !). Impacter les paysages fabuleux du glacier pour monter plus haut ou « stocker des clients », voilà qui ne résonne pas très en phase avec la volonté affichée par le Président de la République en conclusion du One Planet - Polar Summit de novembre dernier de mettre sous protection forte 100 % des glaciers français. 


Rappelons également les engagements du gouvernement au Sénat en décembre dernier, qui en réponse à une question directe sur le projet du T3, disait la nécessité d’« interroger le modèle touristique proposé » et de « minimiser l’impact du projet voire de proposer une alternative durable. » Car c’est un fait : les glaciers sont parmi les derniers lieux de wilderness d’Europe et, à ce titre, sont au cœur du patrimoine culturel de l’Humanité. Les glaciers et les espaces proglaciaires sont de véritables refuges pour la biodiversité. Ils sont aussi réservoirs de paysages et d’ambiances uniques, sans parler du rôle de stockage de l’eau qu’ils assurent. Il est de notre devoir de laisser tranquilles nos géants de glace !

Ancrer les projets dans un esprit de montagne à vivre

Ce projet de téléphérique s’accompagne de création de lits touristiques, d’UTNs structurantes (plus de 12000 m2) étant prévues pour La Grave dans le schéma de cohérence territorial du Briançonnais. Avant que de n’être mystérieusement retirées, des offres immobilières avaient été publiées sur Internet, ventant « des prestations haut de gamme pour votre patrimoine », dans une station « classée parmi les plus beaux villages de France », offrant « des vues à couper le souffle sur le Massif de la Meije », avec « décoration soignée réalisée dans des matériaux noble, spa, jacuzzi, hammam »...

Selon les chiffres de l’INSEE, si la population est en hausse en général dans les départements de montagne, elle est en nette diminution dans les communes des stations de ski. Tous les efforts devraient être tournés vers la vie à la montagne à l’année et pas sur la construction d’appartements « haut de gamme », car les prix de l’immobilier font fuir les jeunes, les familles, les habitants nécessaires pour faire vivre nos montagnes après le ski.

La transition des territoires de montagnes se fera en diversifiant non seulement le tourisme montagnard mais aussi l’économie plus généralement : une vie en montagne respectueuse du vivant et tournée vers ses habitants, et pas que ses visiteurs.

Pour une approche économique cohérente

On notera enfin, sujet plus vaste mais qui va dans le même sens de cette diversification nécessaire de l’économie de la montagne, que le rapport Giraud recommande également d’« établir la mesure exacte du poids économique et financier des activités de tourisme hiver et été par massif en utilisant les mêmes approches et les mêmes indicateurs. » Une mesure que nous avions proposée lors de nos auditions, que ce soit devant la Mission Giraud ou devant les magistrats de la Cour et des Chambres régionales des Comptes, et qui devrait permettre de définir en toute connaissance de cause les axes de construction d’un avenir de la montagne résilient au changement climatique, à La Grave comme ailleurs !

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