Florian Racaché

Les nouvelles fréquentations en montagne

Les êtres humains, toujours plus nombreux et concentrés dans les zones urbaines, ressentent le besoin de s’évader en montagne. On observe une fréquentation grandissante des montagnes, toutes générations confondues, jeunes et moins jeunes, à tous moments de la journée et parfois même... la nuit. Si les chaleurs récurrentes et fatigantes pour le corps et le mental sont l’une des explications à ce phénomène, nous sommes convaincus que ce ne sont pas les seules motivations à cela.

2 min de lecture
Pratiques sportives
Montagne à vivre

Écrit par Frédi Meignan, Vice-Président

Publié le 07 sept. 2023

Vers une quête d'un autre rapport au monde

Ces nouvelles fréquentations ne seraient-elles pas le reflet du désir d’être différemment au cœur des éléments naturels ? Ces grands espaces nous dépassent tellement… Les êtres humains semblent de plus en plus nombreux à chercher à entrer en lien avec ce milieu sauvage qui, longtemps, a été perçu comme une simple curiosité, beau mais subalterne, ou juste... une ressource à exploiter.

Ces nouvelles fréquentations ne seraient-elle pas également un marqueur du désir profond à prendre du recul, de la hauteur, sur une société qui nous enferment dans un statut de simple consommateur... à vie ! Un recul qui nous offre l’espace-temps pour mieux imaginer, rêver et réaliser comment nos existences pourraient être à la fois plus sobres, plus fortes et plus belles ; Mais aussi, plus désirables et respectueuses de la vie terrestre... ?
Ces constats ne sont pas nouveaux. Que chacun se souvienne de ses propres motivations pour aller en montagne, il y a... 1 an, 10 ans ou 40 ans ? Mais ce qui change réellement aujourd’hui est sans doute lié à l’ampleur des crises écologiques, sociétales et à la nette accélération des prises de conscience.

Quels regards porter sur ces nouvelles fréquentations ?

Effectivement, nous observons de nouveaux venus en montagne. Ils n’ont pas toujours "les codes" (selon la maladroite expression consacrée) ni la connaissance du milieu. Au-delà de cet état de fait, interrogeons-nous sur la manière dont nous évoquons et jugeons ces nouvelles fréquentations.

La pratique du bivouac explose et pose des problèmes en montagne ?
C’est vrai. Mais qui, parmi les "montagnards", n’a pas été marqué à vie par son premier bivouac, surveillé par les bouquetins ? Et qui depuis... y retourne, inlassablement. Cet amour du milieu, offert par la première expérience du milieu, n’est-il pas la source secrète et intarissable qui est venue nourrir notre profond désir de connaître et protéger les espaces montagnards ?

De quels codes montagnards parle t-on ?
Dans un temps pas si lointain "nous" (les montagnards) jetions nos déchets dans les crevasses des glaciers, dans le courant des torrents et abandonnions nos bouteilles au sommets des plus hautes montagnes du monde. Mais surtout, depuis combien de temps réduisons-nous la montagne à un simple "terrain de jeux" ? Depuis combien de temps vendons-nous "du rêve" ancré sur des montagnes aseptisées, artificialisées, justes bonnes à être.... aménagées et consommées ?
Sachons reconsidérer cela avant de stigmatiser les nouvelles fréquentations en devenir.

Un tremplin pour faire évoluer nos pratiques

Nous sommes très nombreux à vouloir changer d’approche, repenser notre place sur terre et nos comportements en montagne. Et si cet attrait grandissant pour ces territoires extra-ordinaires portait le présage d’une autre direction pour nos manières de vivre ? Un rapprochement du vivant non-humain, riches de sens et d’enseignement... Une façon d’expérimenter là-haut ce qui est rendu si difficile voir impossible en bas.

Si cette fréquentation croissante n’est pas sans problématique, elle est également une belle opportunité de nous questionner collectivement. Comment réduire notre impact et laisser le moins de trace possible ? Comment apprécier différemment ce qui nous entoure en y étant attentionné ? ...
Ces nouvelles fréquentation nous encouragent également à repenser nos manières d’accueillir en montagne, de faire découvrir, de raconter, de transmettre... ces territoires uniques. Un tremplin pour mettre en œuvre un partage de la montagne dans toute sa richesse, telle qu’on l’aime tous tant. Comment ces attentes des nouveaux publics montagnards pourraient aider à mieux nous questionner ensemble et changer d’échelle collectivement ?

De ces regards croisés, de ces sensibilités nouvelles, pourraient naître de nouvelles perspectives pour nos montagnes. Sachons les saisir !

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